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01/04/2024

Revue Nouveaux Délits n°78

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Cet édito ne m’est pas aisé car j’ai perdu les mots. Cela arrive et ce n’est pas grave même si la cause en est un excès de maux qui dépasse la capacité — même pour une poète bien noire comme je peux l’être — d’assimilation et de transmutation, et ce n’est pas la démence épuisante des décideurs du monde qui va me faire retrouver l’art des mots pirouettes.

 

J’ai perdu les mots mais les silences font des trous dans le temps,  plongent au plus profond de sources insoupçonnées et ramènent dans leurs filets tendus à vif, une poignée de sable : l’essence de soi et des vibrations qui tournent autour des anciens mots, forment un tourbillon et les décapent jusqu’à l’os. Le reste est à brûler, brûler pour renaître, libre des mots radotés, des mots enkystés, des mots qui nous entravent, nous enferment dans les cachots de nos histoires.

 

Et après le labeur des silences, viendront les mots nouveaux, les mots graines.

 

CGC

 

 

 

Toute parole est là pour séduire la mort.

Anne Jullien

 

 

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AU SOMMAIRE

 

Délits de poésie :

 

Jean-Jacques Camy

A. Celnetz, poèmes du temps de la Quarantaine

Alain Lasverne, Rue Révolution

Yve Bressande

Ahmed Elalfy

Marine Giangregorio

Estelle Cantala, Bain de nuit – 4 au champ (extrait)

 

Délits d’(in)citations,  l’écho au fond du puits au-dessus duquel tout poème se penche. Et vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant toujours émerveillé de trouver encore et encore lui aussi un écho parmi vous.

 

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Illustratrice : Alissa Thor

 

« Je peins pour que vous vous arrêtiez, pour aller vers vous, pour faire face. Je peins pour que les mots viennent, et la douceur, et la violence, et les corps tout ensemble. Je peins pour que quelque chose se passe. Quelque chose entre nous, d’intime et de sauvage. » 

Son site : https://alissathor.wixsite.com/alissathor

 

 

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fleurs de prunier blanches
et cette nuit qui devient
la lueur de l'aube

Buson

 

*

 

 

Le 7e délit buissonnier est sorti en février !

 

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J’avais en moi

L’appui sans faille d’un ami

Le temps

 

Il m’a tenu la porte ouverte

Appris à voir à dire

À deviner et à comprendre

 

Il m’a tenu la tête droite

Lorsque j’ai traversé les corridors du vent

M’a appris à tisser le sombre avec le clair

Tisser le doux avec l’amer

 

Il m’apporte aujourd’hui

Son chemin de lumière

Les ombres et les anges

 Enfin réconciliés.

 

 

 

Josette Soulas Moyes est née le 25 décembre 1942. Vous avez pu la lire pour sa toute première publication dans le n° 76 en octobre dernier et c’est une immense émotion et une immense joie, pour moi comme pour elle, d’avoir pu donner naissance à ce recueil magnifique.

 

Illustrations originales de Philippe Chevillard

28 pages agrafées, tirage numéroté sur papier 100 % recyclé

10 € + 3 € de port à commander à l’Association Nouveau Délits

 

 

 

Nouveaux Délits 78 - Avril 2024 - ISSN : 1761-6530 - Dépôt légal : à parution - Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits - Femme orchestre : Cathy Garcia Canalès Illustratrice :  Alissa Thor Correcteur : Élisée Bechttp://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com

 

 

 

01/01/2024

Revue Nouveaux Délits numéro 77

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Aucune vie ne ressemble à une autre et la douleur n’est pas toujours visible, quantifiable, sauf quand elle est si collective qu’on ne peut plus l’ignorer. Aucune vie ne ressemble à une autre, certaines sont tellement pleines de ces épreuves qui jettent à terre, rouent de tant de coups que cela semble n’avoir plus aucun sens. Les épreuves cependant qui nous tordent, nous forgent de l’intérieur jusqu’à parfois toucher la grâce. Toujours au bord pourtant de basculer, grâce ou folie, la frontière est si fine. En ce début d’année où il est de coutume de souhaiter et s’entre souhaiter, mes pensées vont vers toutes celles et ceux qui souffrent dans leurs corps, dans leurs têtes, dans leur vies, dans le corps des êtres qui leur sont chers. Mes pensées se ruent vers celles et ceux qui vivent dans la peur, la terreur, l’horreur, celles et ceux qui sont accablé-e-s par les injustices, celles et ceux qui éprouvent une solitude inhumaine, celles et ceux qui ont le cœur en miettes, l’âme mutilée, celles et ceux qui sont oubli-é-e-s, piétiné-e-s, humili-é-e-s, écrasé-e-s, broyé-e-s, perdu-e-s, poussières… Et je me souhaite — car qui suis-je pour dire à d’autres ce qui leur est nécessaire ? — je me souhaite, donc, le courage de garder dignité quoiqu’il arrive et le sens du respect, la volonté d’être juste, d’accepter ce qui en moi est fragile et blessé, ce qui chemine dans les ténèbres et la force d’endurer ce qui me tord, me forge, me polit et qui, peut-être à la longue, finira par me sublimer. Aucune vie ne ressemble à une autre mais la vie est une seule et même énergie qui nous traverse, nous anime, qui que nous soyons, où que nous soyons : humains, animaux, végétaux et même, à leur façon, les pierres de cette Terre qui n’en peut plus de nous. C’est ce que je ressens au plus profond de moi. Tout est vibration, tout porte un message alors je voudrais veiller toujours mieux à celui que moi-même je porte et transmets à travers mes pensées, mes choix, mes actions, mes mots, mes cellules… Veiller sur les causes car il est toujours trop tard quand il s’agit de réparer de néfastes conséquences… J’essaie de ne pas me décourager trop vite ou trop longtemps. Aucune vie ne ressemble à une autre, que chacune soit belle et sereine comme un lever de soleil, un chant d’oiseau à la nuit tombée, un vin d’amour à partager.

CGC

 

 

 

 

Étant donné que nous avons des cellules qui sont les filles des premières cellules de la vie, nous avons en nous de façon singulière toute l'histoire de la vie... nous avons l'univers en nous.
Edgar Morin

 

 

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AU SOMMAIRE

 

 

Délits de poésie :

 

ᕱ Michel Abécassis

ᕱ Alain Flayac

ᕱ Judith

ᕱ Alexandre Poncin

ᕱ Erwan Gourmelen

ᕱ Marianne Duriez

ᕱ Oriane Barbey

 

Résonance (profonde) : Kogis, le chemin des pierres qui parlent, Éric Julien (Actes sud, coll. Voix de la Terre, 2022).

 

 

Délits d’(in)citations au coin des pages en réflexion. Vous trouverez le bulletin de complicité toujours au fond en sortant avec des étoiles plein les poches !

Grâce à vous, abonné-es et lectrices, lecteurs d’un numéro ou deux, il résiste aux tempêtes inflationnistes et vous en remercie chaleureusement !

 

 

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Illustratrice : Corinne Pluchart

 cheminant toujours en poésie, en bleu, en indicible. Pas de langue autre qu'en poésie. Et la peinture pour la chair, la vibration et la légèreté. Et toujours en terre bretonne.

 

*

 

Bon à savoir : la revue Nouveaux Délits utilise l’écriture inclusive (qui ne portait pas encore de nom mais existait déjà) depuis au moins le n°42, c’est-à-dire avril 2012…

 

 

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Même dans les périodes les plus sombres, nous sommes en droit d’attendre une certaine lumière. Et il est très probable qu’elle ne viendra pas tant de théories ou de concepts, mais de la lumière incertaine, vacillante, souvent faible, que certains hommes et femmes, au cours de leur vie et de leur travail, auront allumée dans toutes sortes de circonstances, la répandant sur le temps qu’il leur a été donné de passer sur terre.

 Hannah Arendt

 

 

 

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Refaat Al Areer, dernier poème

 

Si je dois mourir
tu dois vivre
pour raconter mon histoire
pour vendre mes effets
et acheter une étoffe
et quelques ficelles
(une étoffe blanche avec une longue traîne)
pour qu'un enfant quelque part à Gaza
en regardant le paradis dans les yeux
guettant son père parti dans un brasier
sans dire adieu à personne
pas même à sa chair
pas même à lui-même
voie le cerf-volant, mon cerf-volant tout là-haut
que tu auras fabriqué, volant tout là-haut
et pense un instant qu'un ange est là
ramenant l'amour
Si je dois mourir
fais que cela apporte de l'espoir
que ce soit un conte


 

Refaat Al Areer, poète palestinien, professeur de littérature anglaise, mort à Gaza sous les bombes dans la nuit du 7 au 8 décembre.

 

 

NON À LA GUERRE, À TOUTES LES GUERRES ! STOP !

 

 

 

 

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Nouveaux Délits 77 - Janvier 2024 - ISSN : 1761-6530 - Dépôt légal : à parution - Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès  Illustrateur : Corinne Pluchart Correcteur : Élisée Bec

 

 

 

 

 

 

08/11/2023

Revue Nouveaux Délits - Numéro 76 (extraits)

 

Quelques extraits de ce numéro sorti en octobre 2023, avec des textes de Sandrine Davin, Jean-Louis Clarac, Amandine Gouttefarde-Rousseau, Alain Nouvel, Josette Soulas Moyes, Bruno Giffard, Cathy Garcia Canalès & un poème d'Abdellatif Laâbi. Morceaux choisis et lus par Cathy Garcia Canalès.

En savoir plus : http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com/

 

 

 

 

30/09/2023

Revue Nouveaux Délits n°76

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Nous venons de passer le mois dit de la rentrée : bonne rentrée ! souhaite-t-on… Et la sortie, bonne sortie ? Nous usons au sens littéral de formules, elles finissent par être très polies mais que signifient-elles vraiment ? Formule, c’est joli ce mot si on n’y colle pas de chiffre après, genre formule 1 ou l’air renfermé d’un formulaire…

Et si nous profitions de la rentrée donc pour rentrer oui, véritablement, en nous-mêmes ? C’est ce que nous enseignent les cycles des végétaux qui en cette saison — de notre côté du monde en tout cas —, après avoir tout donné pour se perpétuer, laissent tomber leurs derniers fruits, dernières graines sur le sol où chacun sait ce qu’il à faire puis ralentissent le rythme, laissent redescendre la sève aux racines… Les animaux se préparent aussi pour la saison froide donc ce serait bien le moment de rentrer en soi, voir la rentrée comme un ralentissement, un approfondissement plus qu’une agitation, une accélération…

 

On l’oublie trop souvent : la majeure partie de ce qui se passe dans le monde, se passe d’abord en chacun de nous et on revient à la formule — abracadabra, que le feu de Dieu tombe sur toi ! — et quelle autre déité ici-bas que nous-même, qui décidons et créons, éludons ou provoquons, prévenons ou aggravons ? Sommes-nous déité de la discorde ou des récoltes ? De l’argent ou du soin ? De l’avidité ou du partage ? Ladite nature est imprévisible, oui, mais nous sommes une espèce dite intelligente et nous pouvons concevoir l’imprévisible et protéger l’essentiel. Encore faut-il se mettre d’accord sur ce qui est essentiel... Nous parlons de cultiver notre jardin intérieur : est-il jardin ou terrain vague plein d’ordures ? Jardin ou terre exsangue et saturée de pollution ? Jardin ou zone commerciale ? Jardin ou bunker ?

 

Que formulons-nous dans nos intériorités ? Quelles pensées, quelles intentions laissons-nous se densifier en nous jusqu’à ce qu’elles se matérialisent et agissent à l’extérieur ? Abracadabra ! La magie est un art du quotidien ordinaire, c’est faire bien attention à ce à quoi nous donnons formula, c’est-à-dire « forme », en latin.

 

La poésie est une façon de formuler le monde, qui nous imprègne, nous traverse, nous façonne et nous ensemence de l’intérieur. Un art du quotidien ordinaire.   

CGC

 

 

 

(…) le chaos du monde n’est que la projection du chaos régnant dans chaque individu.

Jiddu Krishnamurti in L’origine de la pensée

 

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AU SOMMAIRE

 

 

Délits de poésie :

 

Sandrine Davin

Jean-Louis Clarac : Poussières aimantes

Amandine Gouttefarde-Rousseau : Nagas (extraits)

Alain Nouvel : Presque riens

Josette Soulas Moyes : Des ombres et des anges (extraits)

Bruno Giffard : Écume au plus sec des tiroirs (extraits)

 

 Où la revuiste se lâche et parle de ses trois derniers livres avec des extraits de Je l’aime nature, sorti en juillet 2023.

 

Comme dans chaque numéro, les Délits d’(in)citations scintillent au coin des pages et vous trouverez à la fin le bulletin de complicité avec ses beaux délits buissonniers mais pas de nouveau en cette année qui exige de se concentrer sur ce qui est déjà là.

 

 

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Illustrateur : Philippe Chevillard

Auteur de BD amateur et illustrateur amateur, je consacre une partie de mon temps à la création de courtes bandes dessinées et l'illustration de textes d'auteurs pour des revues, recueils de poésie, ou affiches. Mes dessins ont été publiés aux éditions Jacques Flament, éditions des embruns, éditions Lamiroy, dans les distributeurs BDs de Short édition, ainsi que dans divers fanzines, recueils, et revues littéraires tels que : Traction Brabant, Le Soc, Le coquelicot, Poétisthme, Soleil Hirsute, La piscine, L’imagineur, L’utopie, Présences d’esprits, Lichen, Hélas, Opuscule, L’Ampoule, Caractère …  https://philippechevillard.fr/

 

 

 

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D'où vient la haine ?

D'où vient la haine

cette haine-ci

qui fuit la conscience

comme la peste

qui proscrit de la langue

la raison

qui réduit le cerveau

à un pois chiche

qui efface des yeux

la lumière

qui déracine du cœur

ce qui pourrait s'apparenter

à un sentiment

D'où vient la haine ?

qui a fermé à double tour

la porte

derrière laquelle se tiennent terrorisés

le doute

le regret

la compassion

le pardon

qui frappent et frappent

à cette porte

jusqu'à ne plus comprendre pourquoi

et s'arrêtent

convertis au désespoir

 

Abdellatif Laâbi

in La Terre est une orange amère

 

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Nouveaux Délits 76 - octobre 2023 - ISSN : 1761-6530 - Dépôt légal : à parution - Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès  Illustrateur : Philippe Chevillard Correcteur : Élisée Bec   

 

 

 

 

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à tire d’aile, septembre 2023

 

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Chaque tome fait 52 pages agrafées comme le premier

imprimé sur papier recyclé 80 g et 250 g calcaire pour la couverture

chaque exemplaire est numéroté et signé

avec dans le tome 2, deux illustrations originales de François Pouch

 

12 € chaque nouveau tome

+ port pour un tome : 2,50 €

pour deux : 4 €  

Offre spéciale pour les trois tomes : 40 € port compris

Pour commander voir en fin de revue

 

 

 

06/07/2023

La revue a 20 ans !!

 

Je n'aurais jamais pu le prévoir, mais voilà  :

la revue Nouveaux Délits a eu 20 ans le 1er juillet ! Dingue !

Merci à toutes celles et ceux qui la soutiennent et y ont contribué d'une façon ou d'une autre !

 

 

*

NOUVEAUX DÉLITS

Revue de poésie vive et dérivés

– Numéro zéro -

juillet 2023

 

  

Pourquoi Nouveaux Délits ? Et pourquoi pas ?

Voilà le point de départ de cette revue qui se lance, à l’eau ou par la fenêtre comme on voudra, l’essentiel étant l’élan, l’impulsion, l’envie de faire. Faire réfléchir plus que plaisir, faire connaissance, faire le lien entre tous et chacun, pourvu qu’il soit avide de paroles, fraîches ou chaleureuses c’est selon, mais dans tous les cas vivantes.

Les auteurs sont lecteurs, les lecteurs auteurs et chacun contribue ainsi à poétiser le monde.

Poétiser : nettoyer les regards de la poussière du conformisme ambiant, goûter des saveurs nouvelles. Nouveaux Délits aime les mélanges, les différences, les mots qui dérangent, qui grattent, qui démangent, pour ne pas céder au sommeil qui dissout les consciences.

Nouveaux Délits à inventer, à commettre ensemble. Poétiser est un acte, pas un luxe.

Soyez à l’écoute du vent qui passe, ignorant les frontières, colporteur de bonnes et mauvaises nouvelles. Confiez-lui vos textes, vos poèmes, vos délires, il en fera peut-être de la matière à Nouveaux Délits.

 

 

 

"Un poète doit laisser des traces de son passage, non
des preuves. Seules les traces font rêver"

René Char

 

*

02/04/2023

Revue Nouveaux Délits n°75

 

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Quelle époque épuisante, collectivement et puis pour beaucoup individuellement ! Tellement qu’écrire un édito pour ce numéro semble au-dessus de mes forces et puis il y aurait tant à dire que ce n’est pas une petite page qui y suffirait. Quelques mots résonnent : colère, absurdité, injustice, paix, changement, radical, urgence, catastrophe, confusion, bêtise, mépris, inhumanité, aveuglement… Mais j’ai trop usé ma langue sur les bords amers et tranchants de ce monde modelé par quelques fous qui prennent toute l’humanité et son futur en otages. Je préfère laisser ma langue non pas aux chats mais à toutes celles et ceux qui œuvrent à alimenter le feu des consciences, à élever l’imaginaire, à semer des graines de sens là où rien ne pousse, à parler la langue du vrai, aussi noire que nécessaire mais qui ne triche pas, qui n’enrobe pas de vernis, de sucre de séduction ; à celles et ceux qui savent la langue de soin qui tend vers l’autre des mots de secours, langue bonne et belle des naïfs qui refusent de jouer dans la cour des cruels et des prétentieux, langue du sage silence aussi quand la cacophonie rend tout contact explosif. Tant de langues, tant de possibles. Car « Nous sommes arrivés à un moment de l’histoire où nous devons d’urgence redéfinir le sens de la civilisation », a dit très justement Hayao Miyazaki et clairement cette langue qu’on nous assène depuis les hauteurs des palais et des étincelants buildings n’a plus rien à voir avec une quelconque idée de civilisation.                          cgc

 

 

Je sais pourquoi

autant se taire

 

Ne pas crier dans le désert

quand c’est chaque grain de sable qui souffre

ne pas parler aux vieux murs qui radotent

 

Passer en silence

avec la petite escorte d’insouciance

qu’on aura un temps séduite

 

Lionel Mazari

 

 

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AU SOMMAIRE

 

 

Délits de poésie :

 

Marie-Florence Ehret, Au jardin (extrait)

Antoine Simon

Marie-Françoise Ghesquier, Le pont suspendu (extraits)

Pierre Gondran dit Remoux, ainsi s’endort le ballast suivi de on hoche on hoche on hoche (extraits)

Marie Tavera

Danielle Querol Bonhomme, Fondrières de la parole

 

Délit de l’autre : Éric Cuissard, L'autre qui était peut-être lui (extraits)

 

Résonance : Gîtes de Julio Cortázar, trad. de l’espagnol (Argentine) par Laure Bataillon, Gallimard, 2012.

 

Délits d’(in)citations ainsi font font font les petites pâquerettes. Vous trouverez le bulletin de complicité fort désolé : la disparition du tarif éco, entre autres, force à l’augmentation du prix de l’abonnement (par voie postale) donc à prendre en compte pour tout renouvellement à partir du 1er avril 2023.

 

 

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Illustratrice :  Anouk Rugueu

 

« Ancienne libraire, j’ai toujours aimé lire, écrire et dessiner. Ayant eu la chance de travailler de nombreuses années à la librairie d’un musée, j’ai pu fusionner mes centres d’intérêt dans le plaisir quotidien de feuilleter des livres d’art, de discuter de création et de livres avec les clients et visiteurs. Je dessine aujourd’hui surtout sur des pages de livres anciens et des matériaux de récup. »                                              

Son site : https://rugueu.com/

 

 

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Pour qui sait se ménager du loisir, une journée s’étend sur mille ans.

Pour qui a le cœur vaste, une cabane est aussi spacieuse que l’univers.

 Zicheng Hong

 

 

 

Revue Nouveaux Délits – Avril 2023 ISSN : 1761-6530 Dépôt légal : à parution – Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès Illustratrice : Anouk Rugueu Correcteur : Élisée Bec                 http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com

 

***


Parution le 1er février 2023

 

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2014-2022

 

"Parfois, j’ai des orgasmes de nature qui m’ouvrent le cœur en deux comme une graine mûre. Je suis l’arbre, la mésange, la grenouille, le nuage, la pluie, l’orage, je pourrais dévaster un bureau de pôle emploi, en faire une jungle pleine de feuilles, de cris et de fouillis odorant. Où est la case poète ? S’il n’y a plus de place pour les arbres, les plantes, les oiseaux, les animaux, il n’y en a pas non plus pour les enfants, les mystiques et les poètes, tout ça c’est la même chose, tout ça est connecté directement à la source, la source vitale, la source de toute chose. Pur ressenti, pure perception en résonance avec le monde des formes mais en totale inadéquation avec celui des normes et des apparences. Il n’y a pas de mystère, tout est mystère et la normalité est une affreuse invention, réduction, supercherie."


à tire d'ailes toujours, 52 pages bien remplies, agrafées, 
papier recyclé à 100 % 
mon illustration en couverture : "Dans la chair", 2023

 

12 € + 3 € de port,  à commander directement : mc.gc@orange.fr

 

01/01/2023

Revue Nouveaux délits n° 74

 

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Un kilo de plomb ou un kilo de plume ? Qu’est ce qui est le plus lourd, me demandait-on, enfant… J’avais déjà ma petite réponse et aujourd’hui encore, je sais : ce n’est pas au poids qu’on juge l’équivalence alors vive les plumes ! Plus il y en a et plus on s’envole, plus il y en a et plus on plonge dans la douceur, la chaleur et peu importe quels drôles d’oiseaux nous sommes ! La noirceur du corbeau peut caresser nos mélancolies mais gardons-nous du plomb… À moins d’être de très talentueux alchimistes, laissons-le là où il est, bien profond sous la terre dans son berceau de cuivre, il y a son rôle à jouer, équilibre d’une terre à terre, yeux dans les yeux des ouragans. Du monde, n’en parlons pas, il nous assourdit trop déjà, chacun-e devrait être en mesure de savoir ce qu’elle-il doit faire pour ne plus se faire plumer ni additionner le plomb et surtout laissons l’amour au-dessus de ça. L’amour ne nous appartient pas, nous sommes ses oisillons et s’il veut bien nous prendre sous ses ailes, ce n’est pas pour y rester mais pour apprendre à donner aux autres plus de légèreté. Plus d’air, plus de lumière à respirer. Ni cage, ni chaînes, ni boulet. Tout s’écroule mais ne perdons pas de temps à nous lamenter sur les pertes, aiguisons notre attention pour percevoir ce qui en nous gagne en légèreté, ne nous laissons pas abattre mais sentons ce poids de plume dans nos poches : plus on le partage et plus il est doux et léger et réconfortant.

 

Que cette année dite nouvelle nous soit douce, tendre et réconfortante.

 

et là

autour

sens tes bras qui s’allègent

la terre sous tes pieds

tu danses

tes mains comme des plumes

légères

l’oiseau

tu l’entends ?

ça pulse

ça palpite

ça pépite…

 

 

CGC

 

 

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AU SOMMAIRE

 

 

Délits de poésie :

Vincent Gispert, extraits d’À l’Est de l’horizon

& Alexandra Norelli

 

Délit de désobéissance et liberté : Joséphine Maaci

 

Délit de poésie (suite) :

Rafaëlle Gandini Miletto, extraits de marées

& Virginie Seba

& Tout un chacun de Pierre Maubé

& Ara Alexandre Shishmanian, extraits des cycles inédits Stases et en-stases et Haillons, traduit du roumain par Dana Shishmanian, avec la révision de l’auteur

 

Résonance hommage : Fée d’hiver d’André Bucher, Le Mot et le Reste, décembre 2011.

 

& petit cadeau de la femme-orchestre

  

Délits d’(in)citations qui incitent à regarder dans les coins.

Vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant, qui pour l’instant fait comme si l’inflation (enflure, gonflement, dilatation, emphysème, œdème…) ne le concernait pas.

 

 

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 Illustrateur : Kiko Christian Moroy

 

Voir sa présentation de poète dans le n° 73 

 

 

***


Sous l'influence d'une grande peur, presque tout le monde devient superstitieux. La peur collective stimule l'instinct du troupeau et tend à produire de la férocité envers ceux qui ne sont pas considérés comme des membres du troupeau. La peur génère des impulsions de cruauté, et donc favorise des croyances superstitieuses qui semblent justifier la cruauté. Ni un homme, ni une foule, ni une nation ne peuvent être fiables pour agir humainement ou penser sainement sous l'influence d'une grande peur. 

Bertrand Russell

 

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En quatrième de couverture : « Reste le choix d’être poète. (…)

 

Si nous restons prisonniers de nos vieux critères, il n’y aura aucune issue. Remettre en cause la croissance illimitée, la prédation décomplexée, la xénophobie revendiquée, l’indifférence assumée, l’arrogance affichée, demande bien plus qu’une évolution : il s’agit de changer de paradigme. C’est toute notre image du monde qui est ici en jeu. Il ne saurait être suffisant, ni même signifiant, d’inventer de nouvelles manières de satisfaire nos vieux démons : il est vital de réenchanter un tout autre « habiter l’espace ». Qui ne renie ni les savoirs ancestraux ni les découvertes scientifiques. Mais qui s’autorise - à titre expérimental - toutes les ruptures, toutes les fractures. La langue n’est pas neutre : renommer la croissance du PIB en « taux de divergence suicidaire » aurait sans doute quelques conséquences sur nos ressentis, nommer « autoterrorisme intérieur » notre décision implicite de n’offrir aucun avenir vivable à nos enfants pourrait éveiller quelques consciences. Les mots comptent. Le poète ne se laisse pas intimider par la dictature malveillante d’une pensée oppressive qui tue chaque possible alternative avant même son éclosion. Comprendre et clamer que le réel pourrait être autre, esquisser l’inchoatif des ramifications avortées, exhiber les modes des mondes manqués constitue le cœur dur de la poésie en acte. Le poète refuse l’unicité du prisme. Même s’il est révolutionnaire, même s’il est solidaire, même s’il est salutaire. User d’une seule grille de lecture relève nécessairement d’une atrophie radicale. Le subtil démissionne dès que le pullulement est réfuté. Le monde est « plus d’un » de dedans et la pensée échoue tout autant quand elle gomme la multiplicité que quand elle omet la déconstructibilité. Les résistances poétiques doivent maintenant se disséminer, se déterritorialiser, se chaotiser, se diffracter et s’infecter mutuellement. Il est question d’écriture mais aussi de pensée, de regard, de ressenti, de geste, d’engagement, de désir, de plaisir. Le vivre poétique est tout sauf triste, étriqué et nostalgique. Il est transgressif, précis et aventureux, par essence. Il peut aussi devenir enchanteur, libérateur et salvateur. Par choix. »

 

Aurélien Barrau - extrait de son intervention à Résistances poétiques, débat qui a réuni Edgar Morin, Isabelle Autissier et Erri de Luca, le 6 novembre 2019, lors du Forum Libération « Finance solidaire : des idées et des actions pour changer la société » à Paris.

 

 

 

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*** les illustrations dans la revue sont en N&B ***

 

Revue Nouveaux Délits – Janvier 2023 ISSN : 1761-6530 Dépôt légal : à parution – Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits  Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès Illustrateur : Kiko Christian Moroy Correcteur : Élisée Bec

 

 

      

 

         

27/09/2022

Nouveaux Délits n°73

MESSAGE IMPORTANT ! Pour celles et ceux qui ne le savent pas, le prix du papier a littéralement explosé : 60 % d'augmentation et pour ce qui est des "délits buissonniers" (comme mes propres livres en autoproduction), le papier est beaucoup plus cher entre autre parce qu'il doit être de qualité pour les illustrations mais aussi parce que ce sont de vrais livres. Avec ça, j'ai toujours utilisé du papier recyclé, encore plus cher donc et de plus en plus rare (comme les fabricants) par un souci d'éthique que je n'abandonnerais pas. Je n'ai pas répercuté cette hausse spectaculaire sur les prix, pas plus que je n'avais répercuté celle des frais postaux mais aussi de l'encre et même de l'imprimante que j'ai dû changer l'hiver dernier en tombant en pleine pénurie mondiale d'imprimantes (!!!?). Comprendre : il faut acheter la gamme bien au-dessus et vite avant qu'il n'y en n'ait plus non plus... Encore un pas, et ce sera tout simplement impossible de continuer, alors comment dire ? Ben tout simplement : abonnez-vous, achetez des livres, soutenez la création et les producteurs indépendants tant qu'il en est encore temps ! Merci ❤

 

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Adepte pratiquante depuis longtemps de la secte des décroissants, alias les khmers verts et autres terroristes en herbe de la simplicité joyeuse et volontaire, je ne devrais que me réjouir du très soudain engouement des zélites pour la sobriété… Enfin, pour notre sobriété, à nous les gens très zordinaires. Un bon nombre d’ailleurs n’a pas été consulté pour être énergétiquement et financièrement sobres depuis longtemps ou toujours — et le picrate bon marché pour l’oublier ne dira pas le contraire. Je dois avouer que je perds vite mon calme devant les énormités proférées actuellement (déjà que…), ce qui est mauvais pour mon évolution spirituelle.

L’art du greenwashing n’a d’égal que celui du brainwashing… et autres anglicismes à la mode (and God took the queen !). En mai dernier, je tapotais sur mon clavier : « Hier j'ai entendu à la radio le terme "écologie pragmatique" sans doute en opposition avec une écologie qui serait utopique, l'un et l'autre ne veulent strictement rien dire, comme 95 % de ce qu'on entend actuellement venant des "autorisés à parler", civilisation du blablabla aux multiples méfaits (…). J'ai souvent eu honte de faire partie d'une espèce qui se laisse ainsi mener par le pire d'elle-même et par ses roquets en chef et qui en redemande de l'hypnose séductrice d'influences en tout genre — et surtout du plus mauvais — mais là ça devient irrespirable. Pour moi il n'y a plus de judicieuse radicalité assez radicale pour stopper cette folie et elle sera de toutes façons étouffée, écrasée par ce besoin de continuer encore et encore à sucer tout ce qui est suçable, à pomper ce qui est pompable. Nous sommes toutes et tous complètement incohérents ! (…) J'ai toujours au fond de ma poche un peu de poudre de perlimpinpin d'espoir — pas de celle qui se jette aux yeux, plutôt celle à diluer jour après jour dans la citerne grise du découragement  — l’espoir que quelque chose va faire ding ou bing ou clash soudainement et en même temps dans la tête de chacun-e d'entre nous, partout sur cette planète ! Et je dois dire qu’un certain nombre de personnes, et notamment des jeunes, mettent de la couleur dans ma poudre mais je n'oublie jamais que des hurluberlus de notre espèce sont bien plus (ir)responsables que d'autres : ceux et celles qui se prennent pour des hurluberélu-e-s pour toutes sortes de déraisons et puis nous autres habitants des pays qui se gavent depuis des siècles, des millénaires même » et je finissais ce coup de gueule trop long pour le mettre ici par « Nous n'avons plus beaucoup de temps et toutes celles et ceux qui ont compris depuis trop longtemps déjà sont fatigué-e-s de tenir la torche allumée, vraiment, je peux le voir, l’entendre et moi-même à ma propre mesure et déception après déception, je n’en peux plus. Alors voilà, aujourd'hui même, tout ce qui nous tue, tout ce qui tue, oppresse, manque de respect à cette planète et à toutes les formes de vie doit tomber, aujourd'hui même, maintenant, là, de suite !!! »

Et bien ce sera là mon édito pour ce numéro d’automne !

 

 

Ne leur pardonnez pas. Ils savent ce qu'ils font.

Claire Séverac (1948-2016)

 

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AU SOMMAIRE

 

 

Délits de poésie : Yvan Robberechts ; Kiko Christian Moroy ; Alain Guillaume & Isabelle Garreau avec des extraits de Manière noire

 

Délit de bonté : Thierry Desbonnets, deux poèmes & des réflexions profondes

 

Délits pluriels : Georges Cathalo avec quelques uppercuts tirés Des pluriels plutôt singuliers & cinq nouveaux poèmes dédiés

 

Délit d’autopromotion pour les Calepins voyageurs et après ? – Tome 1 de Cathy Garcia Canalès, paru en juillet dernier

 

 

Délits d’(in)citations, petits plombs légers au coin des pages, la chasse est ouverte, ici il n’est question que de nourrir l’esprit et non point tuer. Vous trouverez le bulletin de complicité au fond en sortant qui résiste bravement (ou en totale inconscience) à l’inflation, poil au fion !

 

 

 

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Illustratrice : Corinne Pluchart

 

 

Je ne crois pas à un effondrement spectaculaire et brutal, du jour au lendemain. Et je me tiens en retrait de la mouvance "collapsologue", que je respecte pourtant. Il n’en demeure pas moins qu’il est effectivement incontestable qu’une catastrophe est en cours. Ce n’est plus une crainte, c’est un bilan : 60 % des animaux sauvages ont disparu en 40 ans.

Posons-nous une question amusante : sur des échelles des temps géologiques, l'humain laissera-t-il une trace ? Un scorpion-géologue, dans 100 millions d’années, pourra-t-il savoir que nous avons existé ? Naturellement, toutes nos constructions seront balayées : des cathédrales aux usines, il ne restera rien. Et pourtant, il y bien un signe qui marquera le passage des humains sur Terre : la 6e extinction massive. On verra, par les fossiles, que la vie a soudainement périclité sans aucune cause géologique ou météoritique. Voilà la trace que nous laisserons sur notre planète : un anéantissement vertigineux du vivant.

 

Aurélien Barrau

 

 

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Délit buissonnier n° 6 sorti le 1er juillet 2022 !

 

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elle dit non à l’institution
on lui reproche son manque de travail d'équipe
ça dégénère dans sa tête
elle comprend qu’on lui demande de pallier
toutes les incompétences et défaillances
elle est coincée
on lui parle de professionnalisme
de laisser ses émotions de côté
quand pendant deux ans tout le monde semblait
ravi que la maîtresse sorte des cadres affectifs
donne à la petite fille ce qu'elle ne trouvait nulle part d'autre
tout le monde semblait content d'avoir la paix
de cette petite fille comprise au moins par une personne
la maîtresse
c'est pour ça qu'elle décide de changer de métier


 *


illustrations originales de Ludo Godot
tirage numéroté
56 pages agrafées
imprimé sur papier Keaykoulor calcaire

100 g & 250 g 100 % recyclé

 
10 € +3 € de port, à commander à
 l’Association Nouveaux Délits

 

 

Revue Nouveaux Délits – Octobre 2022 ISSN : 1761-6530 Dépôt légal : à parution – Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits - Letou 46330 St CIRQ-LAPOPIE Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès Illustratrice : Corinne Pluchart Correcteur : Élisée Bec                 http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com

 

 

 

 

30/03/2022

Revue Nouveaux Délits n°72

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Il y a des poètes voyants, des poètes pythies, des poètes monstres qui reçoivent en flots continus des données qui — s’ils ne trouvent moyen de les transcrire — peuvent les submerger, les rendre fous. Le flux est tel que la respiration elle-même ne trouve plus sa place, un essoufflement comme une transe dans laquelle tout lecteur sera emporté car il n’aura rien à quoi s’accrocher. Des eaux tumultueuses mais pas glaciales, car le feu ardent de la poésie brûle sans interruption. Possédée, incantatoire, opératoire, comme le chaman qui souffle sa fumée sur le corps du malade. Ici lecteur, c’est toi le malade. C’est nous. C’est l’humanité.

 

Ce genre d’écriture n’est pas à la mode, on l’a dite maudite, elle fait peur, elle inquiète, elle dérange les conforts, agresse les quiétudes organisées, fait sauter les verrous, les défenses, donne le vertige, la nausée, touille nos tripes sans permission. Elle puise à la source même du Verbe tout autant ravageur que créateur. Pauvre poète traversé et sommé de délivrer le message, c’est un écartèlement permanent : s‘il se tait, il devient fou ; s’il parle, on le prend pour un fou. Ce poète est excessif et peu vendeur, on préfère attendre quelques siècles avant de le lire. Pourtant, il voit là où nous sommes aveugles et ce qu’il voit le foudroie, le brutalise : la laideur sans fard, ni masque, la lumière aussi éblouissante que crue, la beauté qui renverse et les ténèbres sans sas de protection. Il ressent vivement là où nous sommes commodément désensibilisés, il se souvient de ce qui est effacé par nos amnésies quotidiennes. Il entend l’effroi, l’écho du gouffre. Il sait ce que nous étions et ce que nous deviendrons si nous ne nous rappelons pas ce que nous sommes.

 

Il sait et il ne sait rien. Il est l’ignorant qui ne peut jouir de son ignorance, il est parcouru, pénétré, transpercé de toute part et chaque mot qui passe par lui est un trou par où nous pourrions apercevoir une fraction de la réalité originelle.

 

Il a appris cependant depuis le temps que ce torrent le traverse, le retourne, le traîne, le broie et le suffoque, à prendre appui dans l’œil des vortex, à trouver des points d’accroche, l’issue en soi incessible. Il est un vivant mort autant de fois qu’il aura fallu pour se dépouiller jusqu'à l’os, voir son âme nue et il nous tend la main, grimpeur aguerri aux chutes, il nous désigne une brèche par où se hisser. Il partage ses visions, se fait conteur, éclaireur, compagnon.

 

 Il y a un sens à trouver à tout ce que nous vivons ou craignons de vivre : il s’agit de guérir. Et le poète-guérisseur trace des chemins de mots comme autant de formules pour briser les maléfices. Du latin malefacio : faire du mal.

 

CGC

 

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AU SOMMAIRE

 

Délits de poésie :

 

    • Anne-Marie Bernad

 

    • Jérémy Semet

 

    • Vincent Calvet : Naître au Mystère (extraits)

 

    • Odile Guillaume : Les Yeux du sablier (extraits)

 

    • Stéphane Mongellaz

 

    • Perle Vallens : Journey (extraits)

 

    • Michel Woelffle : Contes et poèmes d’un été perdu et 71ème hiver (extraits)

 

 

Résonance : Et pourquoi moi je dois parler comme toi ? écrits bruts (et non bruts) réunis par Anouk Grinberg, Le Passeur éd. 15 octobre 2020.

 

 

Les délits d’(in)citations continuent à germer au coin des pages. Vous trouverez le bulletin de complicité peut-être un peu sombre et agité à la sortie, le contexte n’est pas à la fête… Merci infiniment pour votre soutien !

 

 

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Illustratrice : Shenandoah Allheilig-Rivet

 

https://www.instagram.com/shenandoah.allheiligrivet/

 

Artiste plasticienne, passionnée depuis son plus jeune âge, bercée par une multitude d'influences culturelles, elle poursuit aujourd'hui son parcours nomade, mêlant rencontres et créativité, échanges et idées nouvelles. Son travail, s'articulant notamment autour du dessin, s'élargit également à d'autres formes d'expressions et formats (peintures, collage, sculptures, photographie, récup'art, customisation d'objets, Land art).

 

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« Je suis ici pour vous parler de singe à singe. Une cinquantaine de bombes thermonucléaires suffisent à détruire l'humanité. Familièrement appelées bombes atomiques. Mais il n'y a pas cinquante bombes atomiques dans le monde. Il y en a quinze mille.

La question est donc la suivante : si cinquante bombes atomiques suffisent à anéantir l'ennemi et même l'ami, pourquoi en avons-nous construit quinze mille ?

Il n'y a pas de réponse rationnelle. Même la logique de guerre la plus cynique ne peut justifier un tel gaspillage inutile.

Si nous étions au bar entre amis, je vous dirais : c'est la preuve que nous, en tant qu'espèce, ne sommes pas seulement mauvais. Nous sommes aussi des couillons.

Mais s'il y avait un psychanalyste dans le bar, on pourrait aller un peu plus loin : il expliquerait que cette accumulation démesurée est une forme de collection. En psychanalyse, le collectionnisme est étudié comme une perversion.

En 1955, Albert Einstein et Bertrand Russel ont rédigé un appel au désarmement signé par une douzaine de lauréats du prix Nobel. Il disait : "Nous vous demandons, si vous le pouvez, de mettre de côté vos opinions et de raisonner simplement comme les membres d'une espèce biologique en danger d'extinction".

Le mot le plus audacieux, le plus utopique de la phrase que je viens de vous lire est l'emploi du verbe "raisonner". Je ne pense pas que ce soit à notre portée. »

 

Michele Serra, journaliste italien

 

 

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Revue Nouveaux Délits – Avril 2022 ISSN : 1761-6530 Dépôt légal : à parution – Imprimée sur papier recyclé et diffusée par l’Association Nouveaux Délits Coupable responsable : Cathy Garcia Canalès Illustratrice : Shenandoah Allheilig-Rivet Correcteur : Élisée Bec

 

http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

07/02/2022

FRANCOPOLIS a lu le n°71

Revue Nouveaux délits, n° 71, janvier 2022

Cette revue artisanale, conçue, confectionnée à la main, et éditée par Cathy Garcia Canalès, sous les auspices de l’association éponyme, est une pépite : en peu de pages des textes poétiques de grande qualité – ici, Jean-Charles Paillet, Stéphan Riegel, Martin Zeugma, Stéphane Amiot, Bernard Pikeroen, Clo Hamein, Cartographie Mzssyl. Note de lecture de l’éditrice au recueil Feu de Perrine Le Querrec.

http://www.francopolis.net/annonces_2022.html