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15/10/2014

Les poètes, Christian Saint-Paul, radio Occitania

 

Chères et chers amis,

 

Partout les expositions sur la guerre 14 - 18, les publications, les films se multiplient. Toulouse à la Bibliothèque du Périgord réalise une exposition remarquable avec la collaboration de notre fervent archiviste municipal François Bordes ; en Ariège on publie un gros livre sur les soldats du 17ème qui est une mine de renseignements sur ce qu'endurèrent nos proches ancêtres. Et 2014, c'est aussi le centenaire de l'assassinat du personnage le plus mythique de Toulouse : Jean Jaurès. Rémy PECH, Jean-Michel DUCOMTE, Jordi BLANC nous ont déjà légué de beaux et passionnants ouvrages sur le grand homme; l'invité de l'émission du jeudi 9 octobre, Francis PORNON, lui, nous livre un livre d'art sur "Jaurès à Toulouse, lieux et mémoire", superbement illustrés des dessins d'Amina IGHRA. C'est le livre qui manquait pour cerner encore un peu plus l'exceptionnelle personnalité de celui qui repose au Panthéon, philosophe qui aimait tant la poésie (le premier à rédiger une note de lecture sur Rimbaud) et la langue occitane.

Cathy GARCIA poursuit son aventure éditoriale depuis plus de dix ans maintenant. Elle rejoint cette myriade d'acteurs sans lesquels la poésie contemporaine ne serait pas ce brûlot permanent qui réchauffe la froideur d'une époque standardisée par les médias.

Vous pouvez écouter l'émission en cliquant sur : http://les-poetes.fr/emmission/emmission.html

 Le compte-rendu de l'émission :

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En préambule, Christian Saint-Paul exprime sa reconnaissance à ses amis qui lui ont offert ce très beau livre : "Les Poilus Ariégeois dans la Grande Guerre" 1914 - 2014; 1919 - 2019; hommage aux soldats de l'Ariège et de Midi-Pyrénées mobilisés au 17ème Corps d'Armée. Ouvrage collectif de l'Association du Centenaire de la Grande Guerre en Ariège, dédié à Julien, Gustave Langrenez, né le 24 octobre 1898 à Benagues, mort au champ d'honneur à 17 ans le 4 septembre 1916 dans la Somme.

C'est une collaboration exceptionnelle de rédacteurs pertinents qui a abouti à la réalisation de ce puissant ouvrage qui fait le bilan érudit de l'implication de nos soldats occitans dans cette guerre terrible. Enrichi superbement de photos d'époque, de dessins, de croquis de batailles, ce livre d'Histoire nous rappelle que 162 334 soldats de cette région, qui englobe les trois quarts de l'Occitanie et qui va de Bordeaux à Montpellier, ont donné leur vie pour la France. Pour le centenaire d'évocation de cette guerre épouvantable qui a préparé la suivante, il est bon de se souvenir, par la richesse des détails qui font la réalité des choses, de nos proches ancêtres qui ont subi tant de souffrances.

Le livre peut être commandé en relation avec la ville de Pamiers.

 

Christian Saint-Paul signale la parution de: NOUVEAUX DÉLITSRevue de poésie vive et dérivesNuméro 49

Oct. Nov. Déc. 2014

 Cathy GARCIA poursuit inexorablement son excellent travail éditorial et nous livre un nouveau numéro aussi dense et soigné que les précédents. Une mise en page impeccable, des illustrations originales d'une évidente réussite esthétique  - il faut dire que Cathy est aussi une artiste accomplie (dessins, peintures, collages, photographies) - et un sommaire éclectique et ouvert sur le monde. Voici ce qu'elle écrit en guise d’édito :

 

Le missionnaire européen était assis accroupi avec les Indiens Hurons en grand cercle autour d’un feu de camp. C’était une position à laquelle il n’était pas habitué, et il avait le sentiment qu’elle ne l’aiderait pas à convaincre les Indiens de partager son point de vue. Néanmoins il leur a exposé courageusement l’idée selon laquelle il n’était pas un mais deux. En l’entendant les guerriers ont éclaté de rire et ont commencé à jeter de gros bâtons et de la poussière dans le feu. Un étrange mélange de terreur et de ressentiment a alors envahi le cœur du missionnaire. Lorsque les rires ont cessé, il a poursuivi son exposé. Avec patience, il a expliqué aux sauvages que ce corps fait de chair et de sang qu’ils voyaient assis devant eux n’était qu’une coquille extérieure, et qu’en lui un corps invisible plus petit habitait, qui un jour s’envolerait pour vivre dans les cieux. Les Hurons ont gloussé de plus belle, en se faisant des signes de tête entendus tout en vidant les cendres de leurs pipes en pierre dans le feu crépitant. Le missionnaire avait le sentiment d’être profondément incompris, et était sur le point de se lever pour regagner sa tente, vexé, lorsqu’un vieil homme près de lui l’a arrêté en lui saisissant l’épaule. Il lui a expliqué que tous les guerriers et les chamans présents dans le cercle connaissaient l’existence de ces deux corps et qu’ils avaient également de petits êtres qui vivaient en eux, au cœur de leurs poitrines, et qui s’envolaient eux aussi au moment de la mort. Cette nouvelle a réjoui le missionnaire, et l’a convaincu que les Indiens étaient désormais sur le même chemin spirituel que lui. Avec un zèle renouvelé, il a demandé au vieil homme où, selon son peuple, ces petits êtres intérieurs s’en allaient. Les Hurons ont tous recommencé à rire, et le vieil homme a désigné du doigt la cime d’un énorme cèdre millénaire dont la silhouette se dressait dans la lueur du feu. Il a dit au missionnaire que ces « petits êtres » allaient au sommet de cet arbre puis descendaient dans son tronc et ses branches, où ils vivaient pour l’éternité, et que c’était pour cela qu’il ne pouvait pas l’abattre pour construire sa petite chapelle.

Sam Shepard in Chroniques des jours enfuis
 

Au sommaire de ce numéro : 

Délit de poésie : Thomas Sohier, Patrick Devaux (Belgique) et Jean-Jacques Dorio

Délit pin pom et autres poèssessions : Paul Fréval

 Délit de réponse : Pascale de Trazegnies & Cathy Garcia,

Poème  pour  deux  voix  ou  deux  mains

 Délit de suite dans les idées : Cyril C. Sarot, Ces traces laissées dans le sable

 Résonances : Chroniques du Diable consolateur de Yann Bourven

 

Saint-Paul renonce à lire ce jour, le poème à deux voix ou deux mains de Pascale de Trazegnies & Cathy Garcia, car ce texte doit être lu comme il est bien précisé, à deux voix.

Lecture d'un texte plein d'humour de Cyril C. Sarot.

Le n° 6 €, abonnement : 25 € à adresser à Association Nouveaux Délits, Létou, 46330 Saint Cirq-Lapopie.

 

Christian Saint-Paul reçoit son invité, l'écrivain et poète Francis PORNON qui vient de publier chez Loubatières  : "Jaurès à Toulouse  lieux et mémoire"

 

Le sait-on ? Jean Jaurès – « apôtre de la paix » – fut adjoint au maire à Toulouse durant deux ans et demi. Il laisse dans la Ville rose une empreinte indélébile de son engagement et de ses réalisations. Voici des écoles et des facultés, le théâtre et les Beaux-Arts, mais encore des lieux de rencontre comme l’ex-hôtel d’Espagne et le siège du Parti Ouvrier de France, ou même des lieux de conciliation comme l’ex-dépôt des tramways hippomobiles… C’est un beau livre contenant une série de textes inédits (évocations personnelles et littéraires) préfacés par Georges Mailhos et postfacés par Jean-Michel Ducomte, dont le contenu historique est avéré et garanti par l’historien Rémy Pech, avec en regard des illustrations artistiques originales (dessins au crayon et au fusain) de l’artiste Amina Ighra. Il s’agit d’une démarche singulière parmi les publications touchant Jaurès, propre à évoquer à la fois les traces de la pratique du personnage dans la ville, aussi bien que son génie humaniste devenu tutélaire de la République.

97 pages, 25 €

 

Au cours de l'entretien avec l'auteur, lecture d'extraits du livre. Comme le souligne fort bien, avec cette aisance d'analyse qui fait sa renommée, Georges MAILHOS, "ce livre est un livre de conviction, d'agrément et d'amour, et, au total, de plaisir, comme savait le définir Jaurès, celui qui "prend le cœur, en même temps que le cerveau". Par la plume et le crayon de nos auteurs, ces lieux deviennent des sites où choses et gens, pour faire figure, ne se détachent et ne prennent sens que dans un paysage mémorial et symbolique."

Il peut paraître étonnant que les deux séjours de Jean Jaurès à Toulouse, une fois deux ans, une autre fois deux ans et demi, ait pu à tel point imprégner la ville pour une heureuse postérité. Jaurès fut maître de conférences à la Faculté des Lettres et c'est au sein du Conseil Municipal qu'il exerça avec ferveur les fonctions d'adjoint au maire chargé de l'instruction publique. Ceci au cours d'une période de notre histoire où l'éducation était un des principaux enjeux de l'innovation politique. Mais c'est aussi à Toulouse et cela se prolongera même lorsqu'il aura quitté la cité, que Jaurès donna à "La Dépêche de Toulouse" (devenu aujourd'hui "La Dépêche du Midi") ses articles les plus fameux et ses critiques littéraires qu'il signait "le liseur". L'ensemble de cette action dynamique constitue un irremplaçable témoignage de cette époque.

Francis PORNON évoque tous les lieux visités dans son livre et si bien restitués par les dessins d'Amina IGHRA. Le portrait qu'elle réalise de Jaurès et qui est en couverture du livre, est saisissant de vie; c'est un Jaurès loin des clichés du barbu sévère, son visage dégage une jeunesse au regard clairvoyant et terriblement bienveillant.

Francis PORNON a bâti son livre comme une œuvre littéraire avant tout. C'est en poète qu'il observe son sujet, homme mythique assurément, évoluer dans la ville et dans la pensée. Il le suit, en s'immisçant dans ce chemin, en mêlant ses propres souvenirs des lieux à ceux du début du XXème siècle. Il en résulte un récit vivant, sensible et une vraie appropriation des lieux par le lecteur.

Beaucoup de ces lieux à découvrir en lisant le livre, en un siècle ont changé. Tel grand magasin occupe par exemple l'emplacement du Café de la Paix (nom prémonitoire) que fréquentait Jaurès avec ses collègues de la Faculté.

Il y a une délectation à lire ce livre, si bien conçu, qu'il est un livre d'art; le plaisir bien entendu est encore accru pour les toulousains qui vénèrent toujours les lieux dont il s'agit. Mais c'est aussi le souffle de l'histoire et de l'esprit qui accompagne ces promenades où nous entraînent Francis PORNON. Il nous fait imaginer la confrontation Jaurès Guesde, Jaurès de Fitte, le tribun étant avant tout un philosophe dont la thèse de doctorat portait sur la réalité du monde sensible. Il voulait que la culture s'adresse à tous, ce qui à l'époque était une authentique audace. Au lycée de Fermat, son discours de distribution des prix, dans cette noble demeure, résonne encore dans les vieux murs et pourrait être écrit aujourd'hui : "La vie a singulièrement resserré devant vous, jeunes gens, l'espace du rêve ; la lutte pour l'existence est devenue tous les jours plus rude ; toutes les vois sont encombrées et piétinées et vous le savez, et de bonne heure vous faîtes effort".

L'émission s'achève sur les dernières phrases de la postface de Jean-Michel DUCOMTE: "Jean Jaurès est inscrit dans l'asphalte et la pierre de Toulouse, cela le savent même ceux pour qui l'évocation de son nom se limite à une commodité. Mais la mémoire de ce qu'il fut et continue de représenter se loge principalement dans l'imaginaire ou la pensée de tous ceux que continue encore de guider l'exemple de son action et la grandeur de sa pensée. Ceci rend d'autant plus incompréhensible, alors que les Toulousains lui rendaient un ultime hommage en 1924 lors de la translation de ses cendres au Panthéon, le silence de la municipalité radicale du moment conduite par Paul Feuga".

Merci à Francis PORNON de nous avoir donné pour notre patrimoine historique et littéraire toulousain, ce livre aux correspondances parfaites entre les textes et les dessins d'Amina IGHRA, les deux artistes s'inscrivant dans un même élan lyrique mais sobre.     

 

Amitiés à tous,

Christian Saint-Paul  

http://les-poetes.fr

 

 

 

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